Le hangar est fermé mais on ne voit pas la porte. La porte est rouge. Les murs sont rouges. La femme est assise d’un côté du hangar. Ses cheveux sont rouges. Ses chaussures sont rouges. Sa tenue est blanche. L’homme, lui, est de l’autre côté. Il est assis sur une chaise rouge. Cela fait dix minutes qu’ils sont là, se regardent, presque sans ciller. L’homme détourne le regard, il rompt le contact, se lève, marche. Fait les cent pas, restant de son côté. « Ça n’a pas de sens » semble-t-il penser. Entre ses mains, il tient un papier. Il y est écrit à l’encre rouge : « Repeignez cette salle ». L’homme se rassoit, prend le pinceau entre ses mains, le tourne entre ses doigts. Il balaye la salle du regard et tombe encore une fois sur le pot de peinture. De la peinture rouge, évidemment. La femme le regarde. Elle aussi pense que cela n’a pas de sens. Puis elle ferme les yeux. Ses yeux sont rouges, irrités, cette couleur, elle n’en peut plus. Elle a mal de tête. Ses muscles sont endoloris et paralysés à force de rester assise. Elle voudrait se lever mais sa volonté ne suit pas. Elle voudrait crier mais sa gorge lui fait mal à force de ne pas parler. « Ça n’a pas de sens », pense-t-elle. Il murmure « ça n’a pas de sens ». Il le dit, le répète, toujours avec plus de force, plus d’énergie : « ÇA N’A PAS DE SENS ! » hurle-t-il enfin. Alors la femme se lève, marche jusqu’au pot de peinture, son pinceau à la main.
« Commençons », dit-elle. L’homme lui lance un regard interrogatif, un de ceux que l’on lance impuissant face à l’absurdité du monde. « Commencer quoi ? Il n’y a rien à faire. » « Vous préférez rester là jusqu’à devenir fou ? Si nous faisons ce qu’ils demandent, on pourra peut-être sortir. »
L’homme ne répondit pas. Il prit le pinceau, le trempa dans le pot. Le pot de peinture rouge. La femme aussi trempa son pinceau dans ce pot. Ce pot de peinture rouge. Ils s’éloignèrent l’un de l’autre. Alors, ils se mirent à peindre.